Présidentielle 2017 : le vieux truc de la jupe

C’est un truc dont toutes les filles ont un jour ou l’autre usé : quand vient le grand moment (le rancard avec ce beau garçon auquel on osait à peine parler, l’entretien pour ce stage ou ce boulot tant convoité, la fête de l’année chez la coqueluche de la classe), pas d’hésitation sur la tenue à adopter. Il faut sortir la jupe. Et plutôt courte que longue de préférence.

C’est du moins ce que les filles savent sans savoir comment, même si certaines parviennent à y résister. Car la jupe reste un moyen de marquer, plus ou moins discrètement et aux yeux des hommes surtout, un désir de plaire, d’être jolie et attirante, de suggérer une audace toute « féminine ».

La nouvelle affiche de campagne de Marine Le Pen, sur laquelle celle-ci pose en tailleur, assise jambes croisées sur le bord d’un bureau, ne devrait donc pas tant me stupéfier. Femme, la candidate du Front national a recours, dans ce grand moment de sa vie, au bon vieux truc de la jupe, tout simplement ! Pourtant ce bout de jambe nue sur un poster de campagne, même réduit au coin droit de l’image, me fait une étrange impression. Et pour cause, jamais candidate – et encore moins candidat ! – n’avait encore montré, dans sa communication politique, un morceau de cuisse. Une première donc, que l’on pourrait saluer comme une forme d’émancipation de la femme, s’autorisant (enfin) à assumer une forme de féminité dans la sphère politique encore marquée du sceau du sexisme.

Mais c’est ici de Marine Le Pen dont on parle, de celle qui, tout au long de sa campagne, s’est astreinte à ne se montrer, face à ses rivaux mâles, qu’en tenue plus « stricte », parlant haut et frappant fort, cherchant ainsi à se dissocier de travers censément féminins : fragilité, timidité, ingénuité. Jusqu’à accéder au second tour de la présidentielle, Marine Le Pen a mis un soin particulier à « porter la culotte », à éviter maquillage et bijoux, afin de ne pas mettre en avant trop de « féminité », ce fait d’être femme qui avait valu à Ségolène Royal, sa seule prédecesseuse au deuxième tour dans l’Histoire française, quelques cuisants « quolibets » – en dépit de la sobriété de ses affiches ne montrant que visage et haut de chemisier – ou encore à Cécile Dufflot en robe à fleurs d’être huée à l’Assemblée nationale.

Pour sa dernière ligne droite, Marine Le Pen s’affiche donc en femme féminine. N’y contribue pas seulement sa jupe, mais toute sa posture et son brin de sourire, sa jeunesse photoshopée, qui l’apparente plus au cliché de la secrétaire charmante qu’à la femme de terrain. Ce revirement, inattendu à mon sens, tient pourtant d’une stratégie qui, outre de trahir un certain caméléonisme, un inquiétant « prêt-à-tout » de la candidate, est une prise de risque dans un pays dont on peut douter qu’il soit unanimement prêt à ce qu’une femme gouverne. Pourtant, la manœuvre est maligne. « Choisir la France », peut-on lire sur l’affiche. En associant les mots à l’image, Marine devient Marianne, non pas le sein nu, mais la cuisse découverte.

france24

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