Au nom des ONG de défense des droits humains, Asmaou Diallo présidente de l’association des victimes et parents du 28 septembre 2009 a rappelé que le 26 juin marque la Journée internationale pour le soutien aux victimes de la torture.
Mesdames et Messieurs les membres du Gouvernement ;
Excellences Mesdames et Messieurs les représentants du Corps diplomatique et des Organisations internationales accrédités en Guinée ;
Excellence Monsieur le Représentant du Haut-Commissaire des Nations Unies aux Droits de l’Homme en Guinée ;
Mesdames et Messieurs les représentants et membres des organisations guinéennes de la société civile ;
Distingués invités, en vos qualités et grades respectifs ;
Mesdames et Messieurs ;
Permettez-moi, au nom des organisations guinéennes de défense des droits de l’Homme, de rappeler que le 26 juin marque la Journée internationale pour le soutien aux victimes de la torture.
Cette journée est l’occasion d’appeler toutes les parties prenantes, où qu’elles se trouvent, à s’unir pour soutenir les centaines de milliers de personnes dans le monde qui ont été victimes de la torture et celles qui sont encore torturées aujourd’hui.
Mesdames et Messieurs ;
La torture demeure répandue et il y a des victimes de la torture dans toutes les régions du monde. Les études montrent qu’un nombre choquant de personnes sont mêmes favorables à son utilisation.
En Guinée, force est de reconnaître que la pratique de la torture demeure encore dans certains lieux de détention.
Certes, en matière de lutte contre cette pratique barbare, notre pays a connu des avancées significatives dans la réalisation de ses obligations internationales par la ratification le 10 octobre 1989 de la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains et dégradants ainsi que l’interdiction, la prévention, l’incrimination et la répression de la torture à travers la Constitution du 7 mai 2010, le code de procédure pénale et le code pénal de 2016.
Cependant, ces efforts au plan juridique cachent mal les nombreux cas de torture enregistrés dans le pays et pour lesquels l’impunité des auteurs reste assurée.
Pour s’en convaincre, il convient de se rappeler du film ignoble de torture infligée à Monsieur Ibrahima Diogo SOW, par des éléments de la Brigade Anti-Criminalité de Kakimbo qui le soupçonnait d’appartenir à une association de malfaiteurs et qui avait circulé sur Internet en mars 2016.
Malheureusement, la victime a été jugée et condamnée en janvier 2018 à la peine de 15 ans de réclusion criminelle pour association de malfaiteurs et croupit actuellement à la Maison centrale de Conakry en dépit de ses aveux extorqués sur la base de la torture.
Suite à une plainte introduite par l’Organisation Guinéenne de Défense des Droits de l’Homme et du citoyen (OGDH) et l’ONG les Mêmes Droits pour Tous (MDT) avec le soutien de la Fédération Internationale des Droits de l’Homme (FIDH), le Commandant de la brigade qui avait torturé le jeune Diogo SOW a été mis en examen et inculpé pour des faits de tortures et placé sous mandat de dépôt à la Maison Centrale de Conakry où il attend actuellement son procès.
Mesdames et Messieurs ;
Nous, organisations guinéennes de défense des droits de l’Homme saluons cet engagement des autorités à lutter contre le crime de tortures, mais déplorons la lenteur que connaissent le traitement des dossiers portant sur des faits tortures pendant devant la justice Guinéenne.
Nous estimons que face à la grave crise de confiance qui règne entre la justice guinéenne et les justiciables, il est temps que les magistrats mènent des actions courageuses pour libérer la justice.
En effet, dans un État de droit, les impératifs de sécurité doivent aller de pair avec les exigences du respect des droits de l’Homme et c’est à la justice qu’incombe la charge d’assurer la protection des droits de l’Homme en cas de leur violation.
C’est pourquoi, à travers cette déclaration, nous, organisations guinéennes de défense des droits de l’Homme, invitons instamment le Gouvernement guinéen à :
Accélérer le traitement des dossiers portant sur des cas des tortures pendant devant la justice guinéenne, notamment le dossier des jeunes torturés par la garde rapprochée du président de la transition en 2010, le dossier Diogo SOW, ainsi que le dossier des massacres du 28 septembre 2009 où plusieurs personnes ont été victimes de torture ;
Faire ouvrir d’urgence une enquête “impartiale et indépendante chaque fois qu’il y a une allégation ou une plainte portant sur des actes de torture ou de mauvais traitements ;
Rendre disponible et accessible les nouveaux code pénal et de procédure pénale guinéens à travers leur vulgarisation auprès des différents responsables de l’application de la loi, en vue de sensibiliser surtout les officiers de police judiciaire sur les nouvelles dispositions relatives à l’incrimination, la poursuite et la répression de la torture et des traitements cruels, inhumains ou dégradants ;
Faire infliger aux présumés auteurs d’actes de torture et de traitements cruels, inhumains ou dégradants, s’ils sont reconnus coupables, des peines proportionnelles à la gravité de leurs actes tel que prévu par les lois, notamment le nouveau code pénal guinéen, afin que les victimes obtiennent réparation ;
Instaurer, conformément à la Convention contre la torture et au nouveau code de procédure pénale guinéen, un véritable mécanisme national de protection des victimes et témoins d’actes de torture en Guinée ;
Faire appliquer la Conventions des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants en ce que tout procès-verbal établi sur la base d’aveux extorqués sous la torture soit déclaré nul et non avenu ;
Ratifier le protocole facultatif à la Convention des Nations contre la torture (OPCAT), en vue faciliter la mise en place rapide d’un mécanisme national de prévention de la torture ;
Procéder dans les meilleurs délais à une revue à mi-parcours de la mise en œuvre :
-des recommandations adressées à la République de Guinée par le Comité des Nations Unies contre la torture en 2014, suite à l’examen de la Guinée par ledit Comité ;
-des recommandations relative à la lutte contre la torture adressées à la République de Guinée par le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, suite à son second examen en 2015 dans le cadre du mécanisme de l’examen période universel ;
-Renforcer la collaboration avec la société civile pour la promotion et la protection des droits de l’Homme en Guinée en général et la lutte contre la torture au niveau des lieux de détention en Guinée en particulier.
Nous, organisations guinéennes de défense des droits de l’Homme, restons convaincues que la mise en œuvre de ces recommandations contribuerait au respect de la dignité humaine dans notre pays.
Je vous remercie !
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