Babacar Fall, expert électoral revient dans cet entretien accordé à IGFM sur la possibilité ou non de tenir les élections locales au 1er décembre 2019.
Est- ce que techniquement, les élections locales peuvent se tenir le 1er décembre 2019 ?
Dire que les élections locales peuvent se tenir à la date du 1er décembre 2019, c’est assez risqué. Par rapport quand même à un certain nombre de considérants. Les élections ont été reportées dans un premier temps à la date du 1er décembre. Ce que la loi électorale dit, depuis la dernière révision de la loi électorale, il y a le parrainage qui est constitué aux élections locales et en même temps le cautionnement.
Ce que la loi dit maintenant, c’est que le ministre de l’Intérieur a 180 jours devra prendre un arrêté pour fixer le montant du cautionnement. Cela veut que si on fait le décompte à rebours à partir de la date prévue pour les élections, normalement en début février dans la première semaine de février, le ministre de l’Intérieur devrait convoquer les représentants des partis légalement constitués, discutés avec eux, prendre un arrêté pour fixer le montant du cautionnement. Cela n’est pas fait. On est en début en fin Juin (Ndlr: 27 Juin 2019). Cette disposition n’est pas encore réglée.
Ensuite au même moment où le ministre de l’Intérieur devra prendre l’arrêté fixant le montant du cautionnement, il devra prendre un autre arrêté pour publier le modèle de formulaire pour la collecte du parrainage. Ces deux-là vont de paire. Cela m’étonnerait que d’ici la première semaine de Juillet que cette question soit réglée.
L’autre considération, c’est qu’il y a le dialogue politique qui est en cours. Les leaders politiques sont en train de discuter au niveau de la commission cellulaire. Tout le monde sait que la question du parrainage figure également au centre des discussions. Compte tenu de ce qui s’est passé à la présidentielle. Les difficultés d’application des modalités du parrainage. Ne serait-ce que pour ces deux raisons, il sera difficile de tenir les élections locales à la date du 1er décembre 2019.
« Le dépôt des listes de candidatures devrait se faire 80 jours au moins et 85 jours au plus de la date du scrutin, c’est-dire le 12 septembre »
Ensuite, il y a une autre considération. Si on se réfère à la loi électorale, le dépôt des listes de candidatures devrait se faire 80 jours au moins et 85 jours au plus de la date du scrutin. Si vous faites le calcul.
Cela veut dire que les listes des candidatures devraient être déposées aux environs du 12 septembre. D’ici là, il va falloir faire le parrainage, organiser la collecte. Il faudra lancer la campagne de collecte, dans une période pré-hivernale. Dans certains endroits, il a commencé à pleuvoir. S’il faut faire la collecte de signatures entre le mois de Juillet et Août, espérer déposer les dossiers de candidatures dans la première quinzaine du mois de septembre, cela va être assez difficile pour les partis politiques, les candidatures indépendantes. Ne serait-ce que pour toutes ces raisons, les élections ne pourront pas se tenir à cette date là.
Est-ce qu’il y a d’autres considérants au plan technique ?
Il y ‘en a. Il faut que le ministre sorte un arrêté qui fixe pour chaque commune et chaque département, le nombre de parrains à fournir pour chaque de candidats, selon le nombre d’électeurs inscrits dans le département ou la commune. Pour le département, la loi dit qu’il faut 1 à 1,5% des électeurs inscrits. Il faut qu’aussi que ces électeurs soient dans la moitié des communes constituées du département. Pour les communes, il faut qu’il y ait au moins 1% des électeurs inscrits. Au maximum, 1,5%. Il va falloir prendre un arrêté pour que dans les 557 collectivités locales, donner les statistiques, donner le nombre d’inscrits, donner le nombre de parrains à collecter. C’est un problème qu’il va falloir régler.
L’autre problème, c’est qu’il faudra régler à mon avis, si l’élection est maintenue le 1er décembre, il y a des électeurs qui auront 18 ans révolus au moment des élections, le 1er et qui auront des difficultés à s’inscrire. Aujourd’hui la question de l’enrôlement des électeurs qui auront 18 ans révolus à partir du 1er décembre, n’est pas réglé. En principe, on aurait dû ouvrir une période de révision exceptionnelle comme le prévoit la loi pour que ces électeurs qui auront 18 ans révolus et les électeurs qui voudront changer de circonscriptions électorales ou changer de statut pourront le faire. Quand vous mettez tout cela ensemble, ce sera difficile de tenir les élections locales, le 1er décembre 2019.
Si les élections ne se tiennent pas le 1er décembre 2019, on assistera à un second report. Est-ce que cela est permis par la loi ?
Tout dépend des acteurs politiques. Dans le cadre du dialogue politique, si les acteurs se rendent compte qu’en réalité, les élections ne peuvent pas se tenir à cette date pour les raisons invoquées ci-haut, et s’attendent qu’on reporte ces élections, il n’y a pas de problème. Parce que le protocole de la Cedeao interdit au gouvernement de changer la loi électorale six mois avant le scrutin. Mais s’il y a un consensus sur la question, on reporter sans problème. On pourrait le reporter.
Etes-vous pour ou contre le maintien du parrainage ?
« Je suis pour l’abandon du parrainage »
Je suis pour l’abandon du parrainage. Je suis pour le maintien de la caution. Elle peut régler le problème. Elle a un effet dissuasif. Cela est plus gérable que d’instituer le parrainage qui va causer beaucoup de difficultés. Il y a quelque chose qui est en discussion entre les acteurs, c’est qu’aujourd’hui avec tout ce qui s’est pour la présidentielle, est-ce qu’il est pertinent de maintenir le parrainage ou l’abandonner. L’Union européenne a fait récemment une recommandation très forte dans ce sens. C’est une question qu’il faut mettre sur la table et discuter. Il y a le cautionnement. Comment cela va se faire. Le ministre fixe par arrêté le montant de la caution. La loi n’oblige pas un parti ou une coalition à se présenter partout.
Il faudra maintenant mettre en place le dispositif technique pour le contrôle des signatures au niveau des préfets qui reçoivent les dossiers de candidatures pour les départements. Ou les sous-préfets au niveau des arrondissements.
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