
CONAKRY 2-3 MAI 2025
Chers frères et sœurs, camarades délégués et amis invités,
Nous sommes très heureux de vous accueillir à ces assises, très importantes pour notre parti et dont nous espérons qu’elles contribueront à faire avancer notre pays vers un avenir meilleur.
Nous remercions plus particulièrement nos délégués parfois venus de très loin, du fin fond du pays ainsi que nos frères et amis qui nous ont fait l’honneur de se joindre aujourd’hui à nous pour cet important événement.
Comme vous le savez, le congrès est l’instance suprême du parti qui nous permet de nous retrouver tous ensemble, pour faire le point sur la situation politique, économique et sociale du pays, sur le parti et ses activités depuis les précédentes assises et de tracer une ligne de conduite pour les actions à mener à l’avenir.
I. LA SITUATION INTERIEURE
1. Situation politique
Nous ne pouvons que faire le triste constat que depuis la chute du régime dictatorial et sanguinaire du PDG en 1984, après 26 ans de domination sans partage, nous n’avons eu qu’un court intermède civil de 11 ans (2010-2021) au cours duquel il y a eu un pouvoir élu, plus ou moins démocratiquement. Sinon, c’est le même système de conquête et de conservation du pouvoir par la force des armes qui prévaut.
Le résultat de ces 67 ans de dictatures s’étale à nos yeux : la Guinée, avec toutes ses énormes potentialités humaines et économiques, est cité parmi les pays les plus corrompus et les plus arriérés du monde.
Après le coup d’Etat du 5 septembre 2021 qui a porté le CNRD au pouvoir, avec la dissolution de toutes les institutions élues, nous avons comme toujours, fait preuve d’ouverture et de responsabilité en marquant notre disponibilité à travailler avec les nouvelles autorités, pour guérir les maux dont souffre depuis fort longtemps le pays et à assurer enfin son retour sur la voie développement, de l’unité, de la
démocratie, au bénéfice de tout le peuple. Nous avions fait à l’époque des propositions concrètes de réformes institutionnelles et des actions à mener en urgence, pour corriger certaines anomalies des précédents pouvoirs. Nous n’avions manqué aucune occasion de saluer ce qui nous paraissait être des actions positives du nouveau pouvoir : justice, lutte contre les détournements de deniers publics, finition de travaux entamés par le pouvoir précédent, engagement partiel d’enseignants contractuels pour les communautés villageoises, continuation des actions visant l’assainissement des examens, etc.
Malheureusement, cette main tendue n’a jamais été acceptée par les nouvelles autorités dont nous avions perçu à juste titre, l’agenda caché de confiscation du pouvoir. Et pourtant, notre engagement politique n’a jamais été motivé par une quête de position ou de reconnaissance personnelle. Il s’est toujours inscrit dans une démarche de responsabilité citoyenne, avec pour seul objectif de promouvoir l’instauration d’institutions fortes et d’une gouvernance vertueuse, au bénéfice exclusif du peuple de Guinée.
Instruits par l’amère expérience de 11 ans de pouvoir du RPG, nous avons toujours exigé l’application intégrale de l’incontournable loi sur la déclaration de patrimoine des dirigeants et des gestionnaires des fonds publics. Cette position à coup sûr, n’était pas non plus de nature à faire de nous des alliés dociles du pouvoir, ce qui a sans doute contribué un peu plus de leur part au refus catégorique de tout contact
avec nous !
Cette porte hermétiquement fermée en face de toutes les forces du changement véritable, s’est traduite en 2022 par la mise en place du fameux CNT réduit à 85 membres, dont seulement 15 membres viennent des partis politiques. Et nous savons que sur ce quota ridicule, les trois quarts étaient aux ordres du pouvoir !
Au fur et à mesure que le temps passait, nous avons eu toute une série d’actes qui ont confirmé la farouche volonté des auteurs du coup d’Etat de confisquer le pouvoir à tout prix.
Sur fond d’affrontements meurtriers au sein de la junte, ce qui est dans la logique dans ce système, nous avons assisté à beaucoup d’événement qui allaient tous dans le même sens : le refus du pluralisme démocratique, la suppression des libertés fondamentales, les graves violations des droits humains et le retour au système de Parti-Etat totalitaire qui est une négation de la souveraineté du peuple.
Le premier gros signal négatif a été la fermeture de tous les médias privés et mise à la rue de milliers de professionnels, jeunes pour la plupart et responsables de famille. Le pouvoir a ainsi réinstauré la pensée unique et le règne de la peur des arrestations arbitraires et des tortures à l’encontre des acteurs politiques et des professionnels des médias qui leur donnaient la parole, la moindre critique étant considérée comme un délit ! Ce fait est bien illustré par l’arrestation et la condamnation à de très lourdes peines de prison, d’acteurs politiques avec des motifs ne reposant sur aucune preuve matérielle, ce qui veut donc dire que ces victimes sont emprisonnées pour des délits d’opinion.
Plus grave, nous avons assisté à des arrestations ou plutôt à des enlèvements et disparitions de personnes considérées comme un obstacle à la réalisation des objectifs de monopolisation du pouvoir par la junte. Des images insoutenables de tortures parmi les plus inhumaines ont été diffusées. On est donc revenu à la triste période de la terreur et ses méthodes bien connues. La justice prétend n’être au courant de rien et la vie continue !
De nombreux citoyens, issus de divers horizons politiques, font aujourd’hui l’objet de poursuites et de détention, avec des procédures interminables, traduisant une instrumentalisation inquiétante de la justice à des fins politiques. Cette dérive a été particulièrement flagrante dans des cas comme celui du Président du MODEL, poursuivi et jugé pour de simples opinions exprimées publiquement, ou encore d’autres figures connues pour leur engagement civique. Ce glissement autoritaire constitue une atteinte grave aux libertés fondamentales, au-delà des appartenances politiques ou des antécédents de chacun.
Récemment nous avons assisté à des arrestations et condamnations à Mali Yembereng de villageois accusés d’avoir prié en dehors de la date choisie et annoncée 4 jours avant que la lune ne soit vue ! Nous sommes donc dans ce cas aussi face à une violation grave de la liberté de croyance. On jette en prison des
citoyens pour n’avoir pas suivi des instructions à caractère religieux ! Sans compter que dans le cas d’espèce, nous ne sommes plus dans les règles de l’islam appliquées par nos ancêtres depuis des siècles mais plutôt dans le fétichisme et c’est inacceptable ! Nous sommes heureux de constater qu’à Siguiri, les juges ont fait preuve d’indépendance et d’honnêteté, en acquittant les prévenus. Nous ne pouvons que saluer le courage de ces hommes de loi qui ont osé braver les ordres des autorités, pour dire le droit. Nous encourageons tout le corps judiciaire à continuer sur cette voie de l’indépendance de la justice, base de l’Etat de droit véritable et la justice, même pour les plus faibles.
Le lent processus d’embrigadement des populations a continué avec la destitution indiscriminée de tous les élus communaux et leur remplacement par des éléments nommés et dont certains auraient déboursé de fortes sommes d’argent à cet effet ! Avant cela, nous avions toujours dénoncé les agissements de beaucoup d’élus communaux, tous partis confondus, qui se livraient à toutes sortes d’actes illégaux dans leur gestion. Mais dans ces cas, c’est la loi qui aurait dû être appliquée au cas par cas. Avec la généralisation des « Comités de soutien » et la mobilisation forcée des citoyens, nous voilà revenus plus de 40 ans en arrière, à la triste époque du Parti-Etat ! Pendant ce temps, les partis politiques et les
mouvements de la société civile sont interdits de manifestation. C’est le lieu de rappeler que nous avions bien accueilli la mobilisation citoyenne pour effectuer des travaux d’assainissement de l’espace collectif. Mais dans le cas présent, les gens doivent abandonner leurs occupations utiles pour se joindre aux brigades d’acclamation, sous peine de représailles. C’est le lieu de dire que nous ne connaissons pas à l’heure actuelle un seul pays africain vivant dans ces dérives totalitaires qui n’apportent absolument rien de positif au peuple. Personne aujourd’hui ne pourra nous dire quel est le coût énorme de tous ces déploiements de propagande, dans un pays qui manque de tout, avec des populations qui souffrent énormément.
2. Situation économique et sociale
Depuis 1958, l’économie de notre pays repose sur les mines. Cette activité menée par des firmes étrangères constitue pratiquement 98% des exportations ! Au fil du temps, la Guinée est devenue une gigantesque termitière ! Nos ressources – non renouvelables – du sous-sol s’en vont à grande vitesse, non transformées, vendues à vil prix, laissant des populations misérables et des régions entières pratiquement
détruites et impropres à l’exercice des activités économiques traditionnelles (agriculture, plantations, élevage, pêche, apiculture, etc.).
Le résultat de cette situation dramatique est la dépendance extrême du pays de la « monoculture minière ». La Guinée importe la plus grande partie de ce qu’elle consomme ! Pratiquement, il n’y a que l’air et l’eau que nous n’importons pas ! Et encore, beaucoup de robinets n’ont pas une goutte d’eau potable ! L’énorme handicap qui bloque tout le développement économique et social de l’Afrique est cruellement illustré chez nous : nous ne produisons rien de ce que nous consommons et ne consommons rien de ce que nous produisons !
L’entêtement de la politique de « tout pour les mines » traduit bien l’incapacité des gouvernants depuis l’indépendance à mobiliser efficacement les populations pour produire des richesses dont elles seront les premières utilisatrices et les premières bénéficiaires. Cette politique justement ne sert qu’à entretenir la bourgeoisie régnante, à travers un appareil d’Etat surdimensionné, parasitaire et corrompu.
Dans les conditions actuelles, les mines ne sont pour l’Afrique qu’une solution économique de facilité, une rente mortelle. Le CNRD a mis tous ses espoirs dans SIMANDOU, considéré comme la promesse d’un miracle qui va résoudre tous les problèmes du pays, comme par enchantement. Si on veut savoir où peuvent mener ces choix, il n’y a qu’à voir le sort dramatique de pays comme la République Démocratique du Congo ou la Zambie dont les économies reposent comme nous exclusivement sur des mines exploitées depuis des dizaines d’années. Peut on voir aujourd’hui en Afrique et dans le monde des pays où les populations souffrent autant ? Dans l’économie mondiale, les ressources minières sont exploitées principalement par les puissances économiques dominantes, pour leurs propres intérêts. La loi du « gagnant-gagnant » qui devrait s’appliquer à l’exploitation du sous-sol africain est difficilement applicable, tant le rapport actuel des forces nous est largement défavorable.
Cette dépendance extrême de notre pays aux importations dont les coûts sont continuellement soumis à toutes sortes de fluctuations erratiques, est la principale source de la régression économique et de l’inflation sans limites, pour le malheur des masses laborieuses dont les revenus nets ne font que régresser. Pire, n’oublions pas de souligner les conséquences désastreuses pour la santé de la population du fait de cette consommation effrénée de produits importés et dont beaucoup sont impropres à l’alimentation humaine. Dans le contexte de la défaillance presque totale du système de santé, l’espérance de vie chez nous est l’une des plus faibles d’Afrique et du monde.
Tant que l’Afrique n’appliquera pas la règle d’or de « Consommons ce que nous produisons et produisons en priorité ce que nous consommons », la spirale du sous-développement, de la misère et de la dépendance ne sera pas brisée. Nous reviendrons plus tard sur les multiples handicaps que nous relevons et qui empêchent notre pays de se mettre enfin sur cette voie du progrès.
3. Gestion des finances publiques
Depuis toujours en Guinée, la mauvaise gestion et le manque total de contrôle des finances publiques ont été des constantes.
Le pouvoir actuel non seulement n’a rien changé à cette situation insoutenable mais pire, les choses n’ont fait que s’aggraver ! Les gros titres sur des détournement et de malversations portant parfois sur des milliers de milliards et même des tonnes d’or, s’étalent presque quotidiennement dans le peu de médias
réduits à la clandestinité, sans qu’à aucun moment la lumière ne soit faite sur les responsabilités engagées. La gestion du pays est totalement opaque. En l’absence de chiffres fiables, on peut légitimement soupçonner que l’endettement intérieur et extérieur a pratiquement explosé, sans qu’on ne puisse voir les effets positifs concrets sur le terrain. L’impunité reste presque totale, comme d’habitude. A notre connaissance, la CRIEF de service n’a encore pratiquement élucidé aucun sérieux cas de détournement. La corruption, les détournements de deniers publics, les trafics frauduleux de toutes sortes et l’enrichissement illicite en général, sont toujours à l’œuvre. Au plan local, cette situation catastrophique est la même qu’au niveau central. Les maigres ressources du pays sont donc accaparées et dilapidées
par les élites qui n’ont de comptes à rendre à personne.
Tant qu’on ne reviendra pas à la rigueur, à la déclaration des biens, au contrôle strict de la gestion de la chose publique et à la fin de l’impunité, il est inutile de parler de développement et d’amélioration des conditions de vie des masses.
II. LA SITUATION INTERIEURE DU PARTI
1. La période 2015 à 2021
Le 5ème Congrès extraordinaire de notre parti s’était déroulé le 5 septembre 2015.
C’est à partir de ces assises que nous avions pris la décision de nous allier au RPG, en soutenant la candidature du Pr Alfa Kondé pour un second mandat. Cette décision, comme à chaque alliance nouée dans le passé, avait posé pas mal de problèmes en interne. Mais fidèles à la parole donnée, nous avions pleinement participé à la campagne électorale pour soutenir notre candidat commun. Par la suite, il s’est avéré que du côté de nos alliés, tout ceci n’était que manœuvres politiciennes pour tromper l’opinion, en faisant croire à une véritable ouverture vers l’opposition, tout en éteignant des critiques gênantes…En 2018, nous avions tiré les conséquences de cette véritable tromperie en dénonçant les accords
passés.
Dès 2016, nous avions été parmi les premiers à percevoir et à dénoncer les velléités de troisième mandat. En 2018, nous avions participé aux élections communales qui nous ont permis d’enregistrer 5 succès sur les 6 candidatures.
Passons sur les fraudes massives orchestrées par « les grands partis » travaillant à l’époque main dans la main et qui avaient largement entaché ce scrutin. Sans avoir été portés à la tête de mairies, nos élus ont fait honnêtement leur travail, en se mettant comme il se doit, au service des populations qui s’en souviennent encore.
En 2019, lorsqu’il s’est agi de participer aux élections législatives, nous avons refusé d’obéir au diktat d’organisations se disant de la société civile interdisant aux partis politiques de se présenter. Beaucoup d’autres partis avaient suivi ce mot d’ordre, pour le regretter par la suite.
Nous nous étions pleinement mobilisés pour cette campagne. C’est à quelques semaines du scrutin législatif, pratiquement en pleine campagne que le pouvoir a annoncé le couplage avec un Référendum pour le 3ème mandat. Face à ce coup de force, nous avons maintenu notre candidature, tout en réaffirmant avec force notre opposition à ce coup de force.
Ces élections trois fois reportées se sont déroulées sur fond de violences extrême.
A certains endroits, nos militants ont été gravement blessés par des nervis mobilisés par les partis qui boycottaient le scrutin. Dans beaucoup de localités, le scrutin s’était déroulé dans les camps militaires. Les « résultats » étaient cette fois ci tout bonnement consignés sur des procès-verbaux rédigés par la CENI au crayon ! On imagine d’où vient la liste des élus proclamés et dont nous faisions partie pour un seul siège…
L’Assemblée de la 9ème Législature était ainsi dominée à pratiquement 99 % par le pouvoir. Néanmoins, fidèles à nos principes, nous avons pris notre mission au sérieux en adoptant une attitude responsable mais engagée, au service du peuple de Guinée. Dans chaque cas, nous avons consciencieusement réfléchi aux intérêts du peuple à court et à long terme. Lorsque le texte nous paraissait négatif, nous l’avons combattu et voté « Non » ou on s’est abstenu. Par contre, lorsqu’il nous paraissait positif, nous avions voté « Oui ». A chaque occasion, nous avions présenté une argumentation solide, en prenant le peuple à témoin, à travers les médias. Nous pouvons dire en toute modestie, que notre contribution a permis à la
population de connaître quel est l’apport positif d’une assemblée pluraliste à la bonne gestion du pays et à la consolidation de la démocratie. Les souvenirs les plus marquants que nous avons gardés de ces débats ont été ceux du fameux emprunt de 230 millions d’Euros, prétendument destiné à financer la formation professionnelle, le contrat non transparent du Simandou et surtout le nouveau découpage des sous-préfectures qui a fait exploser le communautarisme et même le clanisme dans les zones concernées.
Le coup d’Etat sanglant du 5 septembre 2021 est intervenu dans un contexte de blocage politique, de mauvaise conjoncture économique et de lutte ouverte entre les clans du pouvoir pour la succession de l’élu du 3ème mandat.
2. Depuis le 5 septembre 2021
Dès le départ, nous avions bien capté le message des nouvelles autorités militaires : il fallait éteindre tous les partis politiques non acquis au pouvoir, indépendamment de la question de savoir quelle était la responsabilité des uns et des autres dans la crise économique, sociale et morale que vit le pays.
Au fil du temps, il était devenu de plus en plus clair que nous n’allions pas vers la restauration d’un ordre constitutionnel démocratique mais plutôt vers la confiscation du pouvoir par les nouvelles autorités. Il ne fallait donc pas s’attendre à des élections libres, honnêtes et équitables dans un avenir prévisible.
Alors dans ce contexte d’interdiction des activités des partis politiques, que faire ? Nous avons beaucoup réfléchi à la meilleure façon de ne pas nous asseoir pour attendre on ne sait quoi. Il fallait continuer autrement notre lutte pour le bonheur du peuple de Guinée et de tous les autres peuples africains. Mais cette fois-ci, ce ne sera plus seulement en faisant des propositions, en énonçant des choix politiques ou des concepts théoriques, mais plutôt en allant sur le terrain pour contribuer du mieux que nous pouvions à conscientiser la population sur l’impérieuse nécessité de prendre elles-mêmes ses destinées en mains, afin de commencer à résoudre leurs problèmes de tous ordres, surtout face à un Etat défaillant. Dans ce sens, en 2006/2007, nous avions déjà une petite expérience de promotion de l’agriculture vivrière, avec l’association Barkotiral Nyamdu Ko Remi (Union des producteurs agricoles pour l’autosuffisance alimentaire). Malgré nos efforts et les gros sacrifices consentis, le projet fut abandonné après deux campagnes agricoles. Les difficultés étaient nombreuses et quasiment insurmontables : problèmes d’encadrement, non remboursement des prêts d’engrais, détournements, etc.
En 2021, dans la Préfecture de Dalaba, Sous-Préfecture de Boje, nous avons initié la Coopérative des Agriculteurs Paysans et Eleveurs. Dans ce cadre, il était envisagé de mener des actions concrètes dans le domaine de l’agriculture, de l’élevage, de l’éducation, de la protection de l’environnement et de la santé. Le principe cardinal de cette initiative était la participation obligatoire et active des populations. Ainsi, nous avons fait fabriquer et distribuer des poubelles pour collecter les déchets plastiques, très dangereux pour les animaux domestiques. Les communautés devaient de leur côté s’occuper du vidage régulier de ces poubelles dans des fosses, afin d’éviter l’incinération du plastique, un danger pour la santé. En matière
d’éducation, face à la carence de l’Etat qui n’envoie pas assez d’enseignants qualifiés, nous avons mis en place un gros plan d’action consistant à recruter et à encadrer des enseignants contractuels pour les écoles publiques. Le principe convenu est de partager les frais à 50-50 avec les parents d’élèves. Depuis
septembre 2021, au moins 6 écoles dans Boje bénéficient de ce déploiement d’enseignants recrutés dans les ENI et encadrés par nous. D’autres sous préfectures comme Kankalabe et Marela ont bénéficié de nos actions. Cette expérience continue jusqu’à présent. Le recrutement par l’Etat de certains contractuels communautaires a contribué à alléger le fardeau financier, mais en ouvrant d’autres failles dans le système, avec les aléas de la fonctionnarisation…Nous avons également contribué à la mise en place d’une
ferme expérimentale d’élevage de bovins de race métisse. Cette initiative majeure vise à relancer la production de lait et de viande dans la région.
Au final toutes ces précieuses expériences de terrain, en zone rurale nous ont permis de toucher du doigt les vrais handicaps du développement de nos zones rurales. Aujourd’hui, dans tous ces domaines, nous savons exactement quels sont les obstacles au développement. Malgré des dispositions naturelles très favorables, de très nombreux obstacles plombent les initiatives prise par les uns et les autres
pour promouvoir le progrès :
• Faiblesse de l’appareil d’Etat, gangréné par la corruption et surtout par le bas niveau des serviteurs de l’Etat en général. Les élus locaux sont sur la même ligne ;
• Population jadis laborieuse mais déjà habituée à l’assistanat et à la passivité. La majorité est composée de vieilles personnes et d’enfants sans aucune éducation ;
• Tolérance extrême de tous devant les violations continuelles de la loi, allant jusqu’à des crimes. L’impunité et les « arrangements » sur fond de corruption, sont la règle ;
• Faiblesse des infrastructures et notamment des pistes rurales. Les marchés jamais achevés correctement sont généralement attribués à des entités contrôlées par des responsables des ministères à Conakry ;
• Etc.
C’est donc dire que le problème fondamental à résoudre pour sortir notre pays du sous-développement et de la misère, c’est celui de l’absence de ressources humaines, pratiquement dans tous les domaines. Le phénomène s’aggrave d’année en année. Il ne sert donc à rien de se complaire dans des proclamations médiatiques sur tous les projets imaginables, surtout en cette période électorale. Il faut que dans notre pays on arrête ces tromperies sous forme de promesses vides, seulement suivies de poses de premières pierres, sans lendemain ou de chantiers inachevés. Les Africains en général, doivent sortir des théories sur le développement et passer enfin à la pratique. En théorie, les intellectuels africains ont réussi à résoudre tous nos problèmes, mais sans toucher à aucun !
III. ET MAINTENANT ?
L’expérience vécue et l’observations attentive de la vie politique de notre pays nous ont amené à formuler pour le présent congrès, des thèmes mobilisateurs et justes, pour la relance des activités du parti. C’est ainsi que nous avons d’abord retenu la défense des libertés. Dans toute l’histoire de l’Afrique et de l’humanité, il est reconnu que la possibilité d’un peuple de critiquer librement l’action de ses dirigeants est une condition sine qua non du progrès et de l’épanouissement du peuple. Toutes les périodes de suppression des libertés, de dictature ou même de terreur, ont été associées à la régression économique et sociale, l’aggravation de la pauvreté et même la ruine d’un pays. La Guinée en donne un cruel exemple. Le tout sans compter la rupture du consensus social et la montée des tensions de toutes sortes, mettant en cause le vivre ensemble et la construction en commun d’un avenir meilleur. Depuis la Loi Fondamentale de 1990, vaille que vaille, les libertés fondamentales étaient respectées, contrairement à la période actuelle qui nous ramène à la triste époque de la dictature du PDG. La clé de l’avenir du pays est donc le respect des libertés fondamentales, dans le cadre d’un Etat de droit véritable.
Le deuxième thème associé au premier, est la nécessité de sortir notre pays enfin, du tout politique ! Les enjeux de pouvoir occupent l’essentiel de notre temps, plutôt que le travail, pourtant inscrit dans la devise de notre pays. Dans notre système prédateur et corrompu, pour tous les citoyens, la meilleure voie pour
subsister, satisfaire ses besoins, ce n’est pas le travail honnête, mais plutôt la recherche effrénée d’une position ou d’un levier quelconque dans la machine du pouvoir, pour « prendre sa part », à tout prix. C’est bien pour cette raison que nous estimons que chaque acteur politique, chaque détenteur d’un pouvoir doit être jugé, non pas en fonction de ses proclamations de foi ou ses promesses, mais par les résultats positifs concrets de son action sur les conditions de vie et l’avenir des populations laborieuses. Tout le reste c’est de la tromperie. C’est bien l’avantage d’un vrai système démocratique permettant au peuple de choisir et de reconduire ses dirigeants ou de sanctionner les manquements de ceux-ci, à l’issue d’élections
libres et honnêtes. Sinon, il ne peut y avoir aucune alternance. Ce sera toujours le même système instable qui continuera, avec des individus différents.
C’est pour toutes ces raisons que nous avons demandé aux délégués de présenter à ce Congrès un rapport sur ce que vivent réellement les populations à la base et leurs préoccupations dans tous les domaines : santé, éducation, infrastructures, environnement, sécurité, etc. leurs préoccupations dans tous les domaines. Nous demandons également aux délégués d’inclure dans leur rapport toutes les actions
positives posées par l’Etat en faveur des populations. C’est cela qui devrait être la boussole des dirigeants, avant toute autre chose.
C’est le lieu de réaffirmer notre position sur la nécessité de sortir notre pays de cette impasses politique et économique, en mettant plutôt l’accent sur le développement à la base, dans le cadre de la Régionalisation avancée. C’est la seule voie permettant de réduire le poids écrasant et nuisible à l’efficacité de l’Etat central, prédateur et corrompu, pour qu’enfin nos populations bénéficient réellement des ressources publiques et se consacrent efficacement au développement économique et social durable. Nous remercions encore tous nos invités qui ont bien voulu se joindre à nous en ce jour solennel. Leurs messages seront les bienvenus.
Nous espérons qu’à l’issue de ce Congrès, notre parti en sortira bien avec de fermes résolutions pour la relance des activités, en vue de la réalisation de ses nobles objectifs au service du peuple de Guinée et de tous les peuples africains.
Conakry le 2 mai 2025
Le Bureau Exécutif
Leave a Reply